Lorsqu'on a été condamné à rester emmuré pendant des mois , avec pour seul moyen de déplacement un fauteuil roulant ou quelques pas sondés et limités , une seule chose nous obsède en sortant : courir . Ce mouvement naturel ne l'est alors plus , si bien qu'on doit rééduquer son coup de pied. On a comme cet obsession du dépassement de soi , de rattraper les gestes perdus au plus vite .
On regarde souvent les marathoniens ou simples joggeurs d'un air à la fois moqueur et admiratif. Tout comme la clope ou le chocolat , la course est une addiction . On a besoin d'une dose quotidienne , et la tendinite tend à créer un manque insupportable. Drogue ou non , elle présente plus de bénéfices que d'effets indésirables , si ce n'est cet éternel besoin de bondir partout , appelé communément hyperactivité légère. Les témoignages les plus banals : "Ca me vide la tête , ça me détend" sont finalement les plus parlants. L'esprit est délesté de toute contrariété , inquiétude ou alors celle-ci mue en énergie inconnue. Toutes les pensées négatives paraissent s'envoler dans l'air expiré. Et pourtant quelque chose nous échappe , qu'est-ce qu'on fuit justement?
I-pod vissé sur les oreilles , nature à perte de vue ou tapis prêt à dérouler sur des kilomètres , on est prêt à oublier tout ce qui est devant nous actuellement pour imaginer un futur visiblement façonné par l'adrénaline. Le souffle court du départ ne tarde pas à se transformer en respiration tranquille , régulière , état de plénitude qui ravirait les psychanalystes les plus médusés par les cas de dépression . La course à l'avantage de ne nuire à personne , ni de ruiner celui qui la pratique. Elle est aussi l'objet d'une étrange fascination aux yeux des réalisateurs , auteurs ou photographes.
Étudiant cette passion immodérée en l'utilisant comme trame vive et éperdue , nombre d'artistes ont chaussé leurs baskets ( spirituellement parlant) , chassant aux passage les clichés du coureur écervelé et inhumain . Enquête dans les starting block .
Murakami au marathon d'Hokkaido
Dans son "Autoportrait en coureur de fond" , Haruki Murakami raconte sa passion dévorante pour le jogging , discipline quotidienne qu'il s'impose aussi rigoureusement que l'écriture . Curieuse coïncidence , la ville japonaise qui porte son nom est justement célèbre pour ses marathons. Rythmé par les entrainements interminables et les rédactions de manuscrits jusqu'au bout de la nuit , ce témoignage cardio-cérébral peut déconcerter les adeptes sédentaires de l'auteur du pays du soleil levant , habituellement inspiré par des images poétiques immobiles.
Dustin Hoffman joue les Rocky du jogging dans Marathon Man
Parfois , le sprint final prend des airs héroïques comme dans le célèbre Marathon Man , long métrage de John Schlesinger où Dustin Hoffman campe un sportif impliqué dans une société secrète qui transforme un simple trail en fuite contre la mort . A noter que le film , sorti à la fin des 70's , s'inscrit dans le soudain engouement pour l'activité physique ( notamment l'aérobie) aux Etats-Unis , d'où le look caricatural de Dustin .
En Allemagne , on interprète le thème autrement , quitte à utiliser la course comme une arme redoutable. "Le Braqueur" de Benjamin Heinsenberg sème ainsi les autorités par sa rapidité ,alignant hold up et victoires de marathons.
Côté mode , la meilleure référence de sportswear chic reste l'alliance sophistiquée de Stella Mc Cartney et Adidas , une ligne fluide et contemporaine parfaitement adaptée aux disciplines sportives. Pour la course , la créatrice par ailleurs écologiquement engagée revisite le classique duo coupe vent/short dans une version couture et aérodynamique impeccable. Le prix lui est beaucoup moins appréciable , autant revoir à la hausse son budget sweatshirt .
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire