mercredi 16 octobre 2013

Comment qualifier le dernier album de Moderat ?


BRUMEUX

De Moderat, je ne connaissais que 2 chansons : Rusty Nails qui résonnait sur pas mal de blogs musique il y a quelques années, inclu dans le premier album, dont la pochette représente une jeune dame se filant un coup de poing rageusement. De nombreuses interrogations se posaient alors: Moderat est-il un groupe SM ou serait-ce une campagne déguisée dénonçant  les rhinoplasties catastrophiques?. 



 A l'écoute c'est une mélodie assez accrocheuse rythmiquement parlant, mais à consommer avec moderat-ion ( je devais la sortir celle-là), avec des effets de tragédie galactique. 
Bon en fait c'est très dur de décrire ce que m'évoque cette chanson donc je sors une formule bidon. 

Le groupe semble cultiver cet esprit assez glacial et lumineux à la fois et n'adopte jamais un point de vue manichéen: le bien et le mal fusionnent et s'expriment en musique. Un détail me dérange cependant: la voix du chanteur qui fait plus constipée qu'autre chose, à force de vouloir paraître sensuel et/ou habité par sa musique, ça frise parfois le ridicule: donnez lui du jus de pruneau bon sang!

Depuis j'ai conservé cette chanson pour les jours funestes où j'ai envie de maudire le monde en descendant des litres de nectar de goyave, un Edgar Allan Poe à la main. 

Puis j'ai découvert l'excellent A New Error, que Xavier Dolan a judicieusement choisi en fond sonore dans une scène magnifique de Laurence Anyways ( Dolan + Moderat = l'équation magique). Note pour plus tard: Je vais vous bassiner avec Dolan pendant encore longtemps.



Il y a quelques mois a débarqué ensuite Bad Kingdom ,son clip d'images de comics et ses bruits éléphantesques un peu bourrins : ça bouge bien même si le chant est encore trop maniéré à mon goût. Un léger accent germanique est perceptible dans la voix du chanteur et sa fâcheuse tendance lover s'est (quasiment) évaporée, mais je ne suis pas allée voir plus loin.Grave erreur car ce morceau est clairement le moins bon de l'album ( parce que le plus commercial probablement?).

Après avoir lu une interview du groupe dans un numéro de Modzik, j'ai retenté une approche et déniché le fameux « II » sur Grooveshark ( bon le titre n'est pas d'une originalité confondante).

 Premier constat : les meilleures chansons sont les plus courtes: autrement dit tous les intermèdes, interludes ou bouches trous – appelez ça comme vous voudrez ( Clouded, The Mark, This Time).

Analyse ( pas du tout professionnelle et très subjective, on est pas sur Pitchfork) track par track, dans le désordre tiens soyons fous:

Pour comprendre ces commentaires  qui relèvent d'une grande érudition que ne renierait pas Père Castor et pour avant tout écouter l'album en intégralité, clique d'abord sur ce lien:

Let in the light: Tu peux chanter cette rengaine en te brossant les dents: l'effet sera le même avec du dentifrice dans la bouche. Puis tu affrontes la lumière extérieure, énergisé par cet air bien entraînant.

Damage Done: Attention le chanteur ténébreux est de retour. Si t'écoutes pas les paroles t'as l'impression d'entendre les excuses d'un mec qui a écrasé un troupeau de biches et contemple les dégâts , l'air dépité . L''essuie glace n'effaçant pas les conséquences, il chante derrière son pare brise comme un cakos ( enfin d'après ce que j'ai compris), capot grand ouvert et batterie à vide.

Gita. Chanson typiquement Moderatienne, avec toute une myriade de sons intempestifs dont un « Mehh » un peu lourd . Le reste est cool.

Ilona. On a cette sensation étrange de s'aventurer dans une usine remplie de tuyaux. Mais c'est qui Ilona? La soudeuse comme dans Flash Dance?

Therapy. Le titre doit m'influencer mais j'imagine toujours une rave de psychiatres à Stuttgart en écoutant cette chanson. Ou alors dans un registre complètement différent des athlètes franchissant des haies comme si leur vie en dépendait ( il faut toujours avoir de l'imagination même si ça vire au grand n'importe quoi).

Versions. Très bon titre. Répétitif évidemment mais idéal pour avaler des kilomètres sous un ciel orageux par exemple ( mais on peut tout aussi bien fixer le plafond en gobant des corn flakes en l'écoutant).

This Time. L'ouverture inaugure parfaitement l'ambiance à la fois céleste et industrielle de cet album. Ça irait très bien dans un court métrage sur l'espace des années 70.

Milk. Instant lacté. Ouais c'est comme du lait, c'est frais,  mais ça peut vite devenir écœurant à l'excès. Curieusement je ne peux pas m'empêcher de rapprocher cette chanson de Vanilla Minus de Gold Panda qui effectue une progression graduelle similaire, avec différents paliers  , tout en tournant en boucle pendant une durée assez longue ( 10 minutes ici).


En conclusion cet album est une bonne surprise et m'a incité à écouter quelques vieux titres des compères berlinois ( les noms plus WTF tu meurs): Les Grandes Marches , Porc 1 et 2 ou n°22.

Et si c'est pas assez léger pour toi j'ai la solution : Jennifer Paige! 
 Attention avant de cliquer sur lecture tu seras prévenu, ce titre est absolument atroce.




Tu remarqueras que Jen est un peu constipée aussi, héritage de ronronnements à la Mariah Carey oblige ( on est en 98 aussi). Tous les gimmicks du clip girly de la fin des 90's sont là: virée en voiture, gloss, baby à tout va,regards langoureux et cette capacité assez étrange qu'ont les interprètes de chanter au lieu de prendre part à l'instant présent : ça donne une espèce de décalage- ou effet méta- totalement improbable dans la vie réelle ( je me vois mal me mettre à chanter chez Picard en saisissant mon sachet d'haricots verts). Ah et ce titre tout à fait édifiant: CRUSH. Mot plus usité depuis un siècle ( qui signifie béguin) , que je voyais partout sur les magazines de pouffes anglaises que j'achetais, souvent accolé à "Sassy". 

Sans oublier le Shalala qui relie chaque couplet de manière très complexe. Je surkiffe les plans rétroviseur avec le dragueur 1998 et ses effets de cheveux et les ralentis sur la balançoire. C'est tellement profond. ( Aha j'espère que tu as saisi l'ironie).





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